Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 07 Mars 2018

Limite à la rétroactivité de la fixation de la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants.
 
Après avoir vécu dans une union libre de nombreuses années avec Madame X, Monsieur A, a adopté l'enfant de Madame X. âgé de 7 ans par jugement du Tribunal de Grande Instance en 2008.
 
Le couple s'est par la suite séparé.
 
Plusieurs années plus tard, une requête datée du 9 octobre 2017 est initiée par Madame X pour saisir le Juge aux affaires familiales afin qu'il fixe l'exercice de l'autorité parentale, le droit de visite et d'hébergement, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant ainsi qu'au paiement d'une somme de 11.700,00€ au titre de la rétroactivité de la pension sur une période de cinq ans.
 
Le point sur lequel est portée notre attention est la "fixation rétroactive de cette contribution à l'entretien et l'éducation sur cinq ans".
 
Il convient d'établir le contour de cette contribution à l'entretien et l'éducation, notamment sa fixation dans le temps.
 
L'article 371-2 du Code civil pose le principe selon lequel "Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant."
 
La Cour de cassation dans un arrêt de la 1ère chambre civile en date du 19 novembre 2014, (n° 13-23732) fait illustration de l'application de cet article.
 
La jurisprudence déduit de ce principe "que le parent qui a subvenu aux besoins d'un ou plusieurs enfants communs dispose contre l'autre parent d'un recours pour les sommes qu'il a payées excédant sa part contributive, compte tenu de leur facultés respectives."
 
La séparation, par exemple, crée cette situation où un parent doit subvenir, a priori, seul au besoin de ses enfants.
 
Sur cette situation, à titre d'exemple, la Cour d'appel de RIOM dans un arrêt en date du 23 février 2004 apporte une réponse en estimant que "la fixation judiciaire de la date de transfert d'hébergement habituel ouvre naturellement droit au profit du parent nouvellement chargé d'héberger les enfants :
 
- à une action en répétition pour les sommes indûment payées alors que les enfants avaient déjà déménagé,
 
- à une action en paiement pour la période qui s'étend de ce déménagement jusqu'à la décision qui en consacre la légitimité
".
 
Ainsi, le parent dont le domicile sera désigné comme étant la résidence habituelle des enfants obtiendra de l'autre parent une contribution à l'entretien et l'éducation des enfants, faut-il encore introduire la demande afin de disposer d'un titre.
 
En effet, la formulation de la demande de contribution à l'entretien et l'éducation devant le Juge aux affaires familiales permettra à ce dernier s'il est fait droit à la demande d'indiquer les mesures prises et de les matérialiser dans un titre officiel.
 
Ainsi le titre officiel permettra l'exécution au profit du parent bénéficiaire.
 
En somme, l'existence d'un titre exécutoire est indispensable pour obtenir les arriérés d'une contribution à l'éducation et l'entretien non-payée.
 
Dans notre affaire, "Madame X formule une demande de paiement d'arriérés de contribution, qualifiée de « fixation rétroactive depuis cinq ans » […]."
 
La chambre familiale du Tribunal de Grande Instance a estimé concernant cette demande que :
 
"Cependant, dans la mesure où il appartenait à Madame X de saisir, il y a cinq ans le Juge aux affaires familiales pour éventuellement faire fixer la part contributive, il ne sera pas fait droit à cette demande […]."
 
De manière évidente, la chambre familiale du Tribunal de Grande Instance a ici sanctionné la "passivité" de Madame X à faire fixer la part contributive réclamée en rappelant que la demande de fixation "rétroactive" portée aujourd'hui aurait du être formulée il y a 5 ans déjà.
 
Il ressort de cette sanction, la nécessité d'introduire le plus rapidement possible la demande de fixation de la contribution auprès du Juge aux affaires familiales afin d'obtenir la fixation de celle-ci matérialisée dans un titre exécutoire dont le bénéficiaire pourra se prévaloir pour forcer le paiement en cas de défaillance du débiteur de la contribution à l'entretien et l'éducation.
 
Article rédigé par Monsieur Mohamed-Chaabane SGHAIER, étudiant à l'Institut d'études judiciaires à l'Université de Droit et Sciences Politiques de NICE et stagiaire au Cabinet de Maître Florian FOUQUES.
 
N'hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements sur ce type de situation au 04.93.58.10.96 ou par courriel .

  Tribunal de Grande Instance de Grasse, 07 mars 2018.
 
Texte intégral
 
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE GRASSE
CHAMBRE DE LA FAMILLE
4 EME CHAMBRE CABINET B
 
JUGEMENT DU 07 MARS 2018
DECISION N° : 2018/121 B
RG N° 17/04589
 
JUGEMENT
Rendu par Madame Caroline VERCAMER, Vice-Présidente, Juge aux Affaires Familiales, assistée de Madame Martine COLLIN-ALLOUCHE, faisant fonction de Greffier, après débats en Chambre du Conseil à l'audience du 14 Février 2018, mis en délibéré à ce jour.
 
DEMANDERESSE :
Madame X...
Comparante en personne, assistée de Me F…, avocat au barreau de NICE
 
DEFENDEUR
Monsieur A…
Comparant en personne, assisté de Me Florian FOUQUES, avocat au barreau de GRASSE
 
EXPOSE DU LITIGE :
 
Madame X… et Monsieur A… ont vécu en union libre.
 
Par jugement du 3 juin 2008, du tribunal de grande instance de Grasse, Monsieur A… a adopté en la forme de l'adoption simple l'enfant de Madame X... âgé de 7 ans.
 
Le couple s'est séparé.
 
Par requête enregistrée au greffe le 9 octobre 2017, Madame X… a saisi le Juge aux affaires familiales aux fins de voir fixer :
 
  • L'exercice de l'autorité parentale conjointe.
  • La résidence chez la mère.
  • Droit de visite et d'hébergement du père :
  • Un Week-end sur deux refus du vendredi sortie de classe au dimanche soir 17 heures,
  • La moitié des vacances scolaires, première moitié les années paires et secondes moitié les années impaires.
  • Fixation de sa contribution à l'entretien éducation de l'enfant à 450 €.
  • Le condamner au paiement d'une somme de 11.700 € au titre de la rétroactivité de la pension sur une période de cinq ans.
 
A l'appui de ses prétentions et lors des débats qui se sont tenus à l'audience du 14 février 2018, elle fait valoir que l'enfant est en grande souffrance psychologique, ayant eu une tentative de suicide du fait d'un sentiment d'abandon de la part de son père et qu'elle a besoin de voir son père plus régulièrement. Par ailleurs il n'a pas versé régulièrement la contribution alimentaire qu'il s'était engagée à verser.
 
Monsieur A… a conscience de la souffrance de sa fille mais constate que les relations sont très compliquée avec des tensions régulières entre F… et sa nouvelle compagne, raison pour laquelle il solicite en l'état un droit de visite simple une fois par semaine.
 
Il formule également son accord sur le versement d'une contribution de 450 € par mois, mais s'oppose au paiement de l'arriéré dans la mesure où une résidence alternée a été pratiquée sur la totalité de la période jusqu'en décembre 2016.
 
Les dispositions de l'article 388-1 du code civil ont été rappelées. F… a souhaité être entendue mais ne s'est pas présentée à l'audition prévue le 7 février 2018.
 
L'absence de procédure en assistance éducative a été vérifiée.
 
La décision, contradictoire a été mise en délibéré au 7 mars 2018.
 
MOTIFS DE LA DECISION
 
Sur l'exercice de l'autorité parentale
 
En l'espèce, il y a lieu de constater l'accord des parties pour un exercice conjoint de l'autorité parentale, conforme à l'intérêt de l'enfant.
 
Sur la résidence de l'enfant
 
L'article 373-2-11 du code civil énonce que le juge se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale en prenant en considération :
 
1°) La pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure;
2°) Les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues par l'article 388-1 du Code Civil;
3°) L'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre;
4°) Le résultat des expertises éventuellement effectuées;
5°) Les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre enquête sociale.
6°) Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par un des parents sur la personne de l'autre.
 
Compte tenu de l'accord des parents sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, de la conformité de cet accord avec l'intérêt de l'enfant et de la situation de fait qui prévaut, la résidence habituelle de l'enfant sera fixée chez la mère.
 
Sur les droits de visite et d'hébergement du père
 
Aux termes de l'article 373-2-9 du Code civil, lorsque la résidence de l'enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent. Ce droit de visite, lorsque l'intérêt de l'enfant le commande, peut être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge.
 
Au vu de la détresse psychologique de l'enfant et de la nécessité impérieuse de restaurer la relation père fille, et de bénéficier éventuellement d'un encadrement éducatif, il y a lieu de prévoir que ses droits de visite s'exerceront deux fois par mois en lieu neutre suivant les modalités qui seront précisées au dispositif. Ses droits d'hébergement seront réservés.
 
Sur la part contributive à l'entretien et l'éducation de l'enfant
 
Conformément aux dispositions de l'article 371-2 du Code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant.
 
Le montant de cette contribution peut être révisé en cas de modification dans la situation des parties ou des besoins de l'enfant. Il doit s'agir d'un changement notable et ne procédant pas d'un acte délibéré ou d'un comportement fautif.
 
En l'espèce, la situation matérielle des parties s'établit ainsi qu'il suit :
 
Madame X… est chef de service auprès de l'organisme C… de Nice et perçoit un salaire de 3042 € ainsi que des revenus fonciers d'un montant de 350 € par mois. Outre les charges de la vie courante, elle supporte le remboursement de mensualités de crédit immobilier d'un montant total de 1000 €. Concernant F…, elle indique régler des frais de scolarité, de cantine d'un montant total de 170 € par mois, des frais de soutien scolaire pour 240 € par mois, des frais de transport d'environ 100 € par mois, d'activités sportives 190 € par mois, de séjours linguistiques de 250 € par mois, des frais de psychiatres 216 € par mois, d'orthodontie 130 € par mois.
 
Monsieur A… est plombier et perçoit un revenu moyen de 4000 €. Il vit en couple et s'acquitte d'un loyer de 1200 €.
 
Compte tenu de tous les éléments de la cause, en particulier de l'âge de l'enfant, de ses besoins actuels, des ressources et des charges des parties et de leur accord, il convient de fixer la part contributive de Monsieur A… à l'entretien et l'éducation à la somme de 450 € par mois.
 
Madame X… formule en outre une demande de paiement d'arriérés de contribution, qualifiée de "fixation rétroactive de contribution depuis cinq ans" puisqu'il ne relève pas de la compétence du juge aux affaires familiales de statuer sur l'arriéré.
 
Cependant, dans la mesure où il appartenait à Madame X… de saisir, il y a cinq ans le Juge aux affaires familiales pour éventuellement faire fixer la part contributive, il ne sera pas fait droit à cette demande qui ne pourrait qu'envenimer les relations avec le père.
 
Sur les dépens
 
Compte tenu de la nature familiale du litige, les dépens seront partagés par moitié.
 
PAR CES MOTIFS:
 
Le juge aux affaires familiales, statuant après débats en chambre du conseil, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
 
EN CONSEQUENCE :
 
Constate l'accord des parties pour que l'autorité parentale s'exerce conjointement;
 
Rappelle que l'exercice conjoint de l'autorité parentale implique que les parents doivent:
 
  • Prendre ensemble les décisions importantes concernant la santé, l'orientation scolaire, l'éducation religieuse et tout changement de résidence de l'enfant;
  • S'informer réciproquement, dans le souci d'une indispensable communication entre les parents, sur l'organisation de la vie de l'enfant (vie scolaire, sportive, culturelle, traitement médicaux, loisirs, vacances);
  • Permettre les échanges de l'enfant avec l'autre parent, dans le respect du cadre de vie de chacun;
 
Fixe la résidence habituelle de l'enfant au domicile de la mère.
 
Réserve les droits d'hébergement de Monsieur A…
 
Dit que le droit de visite de Monsieur A… se déroulera dans un lieu neutre, qui aura pour mission de suivre le droit de visite du père, qui se déroulera dans les locaux T…, à l'occasion de deux fois par mois, selon les modalités qui seront déterminées par l'Association en concertation avec les parties, l'enfant devant y être conduit et repris par le parent chez lequel la résidence habituelle de l'enfant est fixée, ou tout autre personne honorable;
 
Dit qu'il appartiendra aux parents préalablement à l'exercice de ce droit de visite, de prendre contact téléphoniquement avec les responsables de l'espace-rencontre et qu'ils seront astreints à respecter parfaitement tant son règlement intérieur que les directives qui pourraient leur être données par l'équipe d'intervenants;
 
Dit qu'en cas de non-respect par l'un des parents du règlement ou des directives données par l'équipe d'intervenants, le service est d'ores et déjà autorisé à supendre les rencontres, et devra faire un rapport de la situation au juge aux affaires familiales;
 
Dit que la durée de chaque rencontre sera comprise entre une heure et deux heures, selon l'âge de l'enfant et la dynamique familiale;
 
Dit que les parties pourront prévoir, d'un commun accord, d'autres modalités d'exercice du droit de visite en dehors des locaux du point de rencontre;
 
Dit que le T… exercera sa mission au cours d'une période de six mois, à compter de la première rencontre, un rapport d'évaluation devant être communiqué à l'issue de la période à chaque partie et au Greffe des Affaires Familiales;
 
Dit qu'à l'issue de ce delai, il appartiendra éventuellement à la partie la plus diligente de saisir à nouveau la juridiction compétente à raison du lieu de résidence habituelle de l'enfant mineur, afin qu'il soit sattué sur le droit de visite et d'hébergement du père, au vu du rapport;
 
Fixe à 450 € par mois le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant que Monsieur A… devra verser à Madame X…
 
L'y condamne en tant que besoin;
 
Dit que ladite pension sera payable chaque mois avant le cinq et d'avance au domicile du parent gardien et sans frais pour celui-ci, même pendant les périodes ou le parent non gardien exercera le cas échéant son droit d'hébergement;
 
Précise que cette pension alimentaire sera due jusqu'à l'âge de 18 ans et même au-delà sur justification par le parent qui assume la charge de l'enfant de ce qu'il ne peut normalement subvenir lui-même à ses besoins, notamment en raison de la poursuite d'études sérieuses.
 
Dit que cette pension sera indexée sur l'indice mensuel des prix à la consommation des ménages urbains, hors tabac, dont le chef de famille est ouvrier ou employé (poste de dépense : 295, série France entière, publié par l'INSEE, cf sur internet www.insee.fr) la revalorisation devant intervenir à la diligence du débiteur le 1er janvier de chaque année sur l'indice de novembre précédent, l'indice de référence étant celui de la présente décision selon la formule:
 
(montant initial pension) x (nouvel indice)
Indice initial
 
Précise en outre aux parties, conformément aux dispositions de l'article 465-1 du Code de procédure civile, en cas de défaillance dans le règlement des pensions alimentaires.
 
1°) Le créancier peut obtenir le règlement forcé en utilisant à son choix une ou plusieurs des voies d'exécution suivantes :
 
- Saisie-attribution entre les mains d'une tierce personne, qui doit une somme d'argent au débiteur alimentaire.
- Autres saisies.
- Paiement direct par l'employeur.
- Recouvrement public par l'intermédiaire du Procureur de la République.
 
2°) Le débiteur défaillant encourt les peines prévues par les articles 227-3 et 227-9 du nouveau Code Pénal à savoir deux ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, interdiction des droits civils, civiques et de famille, suspension ou annulation du permis de conduire, interdiction éventuelle de quitter le territoire national;
 
Déboute Madame X… de sa demande de fixation rétroactive de la contribution depuis cinq ans;
 
Fait masse des dépens et les partage par moitié;
 
Précise toutefois que la présente décision ne sera susceptible d'exécution forcée qu'à compter de sa signification par huissier de justice par la partie la plus diligente;
 
ET LE PRESENT JUGEMENT A ETE SIGNE PAR LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.

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