COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE en date du 04 Novembre 2021

Responsabilité d’un bailleur suite à la chute d’une locataire causée par un trou dans le sol du parking.
 
Dans ce dossier, la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence a été amenée à trancher un litige opposant un bailleur social à une locataire qui avait chuté du fait d’un trou dans la chaussée du parking de sa résidence.
 
Dans le cadre de la décision de première instance, notre cliente avait été déboutée de sa demande indemnitaire au motif quelle avait notamment commis une faute en:
 
"Par ailleurs, le fait qu'il existe un affaissement de cet enrobé ne dispensait pas la locataire d'être normalement attentive et de veiller à sa propre sécurité, alors même qu'il est établi qu'elle connaissait parfaitement les lieux et donc l'existence de cet affaissement puisqu'elle est occupante de cet immeuble et qu'il ressort de la lecture de l'attestation de Madame L... que la chute est survenue alors que Madame V... parlait à sa voisine qui se trouvait sur son balcon, et marchait ainsi de nuit (chute intervenue entre 22h40 et 23h15 suivant la témoin) sans regarder devant elle mais au-dessus d'elle."
 
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence par Arrêt en date du 4 novembre 2021 a parfaitement apprécié la situation en écartant une prétendue faute de la victime et en rappelant les obligations suivantes du bailleur:
 
"Il en résulte qu’un défaut d’entretien ou de réparations de la chose louée susceptible d’entraver la sécurité du locataire, engage la responsabilité du bailleur et l’oblige à indemniser son locataire du préjudice corporel que sa négligence a causé."
 
La prétendue faute invoquée contre notre cliente a été retenue uniquement à hauteur de 25 % et son indemnisation a pu être effectuée sur la base de 75 %.
 
N'hésitez pas à nous contacter pour plus de renseignements sur ce type de situation au 04.93.58.10.96 ou par courriel .

  Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE, 04 novembre 2021
 
Rôle N° 20/11131

Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE
Chambre 1-6
 
ARRÊT AU FOND DU 04 NOVEMBRE 2021
 
Décision déférée à la Cour:
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 20 Octobre 2020 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/04981
 
APPELANTE :
Madame V…,
représentée et assistée par Me T…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me M…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et par Me Florian FOUQUES, avocat au barreau de GRASSE.
 
INTIMEES :
CPAM DU VAR, demeurant Avenue de Lattre de Tassigny Le Sagittaire BP 103 - 83604 FREJUS CEDEX,
Défaillante.
 
EPIC OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DU VAR , demeurant Avenue Pablo Picasso - 83160 LA VALETTE DU VAR
représentée par Me F…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE.
 
Société M…,
représentée par Me F…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE.
 
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Septembre 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Fabienne ALLARD, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
 
La Cour était composée de :
 
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Madame Anne VELLA, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère
qui en ont délibéré.
 
Greffier présent lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.
 
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Novembre 2021.
 
ARRET :
 
Réputé contradictoire
 
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Novembre 2021,
 
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
 
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
 
Le 20 décembre 2016, Mme V…, locataire d’un appartement que lui loue l’office public de l’habitat du Var, a fait une chute devant l’immeuble où est situé son appartement. Elle explique avoir chuté sur un affaissement de la chaussée situé sur le passage face à l’entrée de l’immeuble.
 
En 2017, elle a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan d’une demande d’expertise.
 
Par ordonnance du 21 juillet 2017, le juge des référés a désigné un expert en la personne du docteur I….
 
L’expert a déposé son rapport le 15 janvier 2018.
 
Par acte du 29 juin 2018, Mme V… a fait assigner l’office public de l’habitat du Var et son assureur, la société M…, devant le tribunal de grande instance de Draguignan, afin d’obtenir, au contradictoire de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var, l’indemnisation de son préjudice corporel.
 
Par jugement du 20 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Draguignan a:
 
  • débouté Mme V… de ses demandes;
  • condamné Mme V… à payer à l’office public de l’habitat du Var et à la société M… une indemnité de 1 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
  • condamné Mme V… aux dépens.
 
Pour statuer ainsi, il a considéré que:
 
  • Mme V… ne rapporte pas la preuve que sa chute est due à l’état de la chaussée qui se serait affaissée;
  • les éléments produits démontrent qu’elle a commis une imprudence à l’origine de sa chute, celle-ci étant survenue alors qu’elle discutait avec sa voisine qui se trouvait en hauteur sur son balcon, et qu’elle marchait de nuit sans regarder devant elle.
 
Par acte du 16 novembre 2020, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Mme V… a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle l’a déboutée de ses demandes et condamnée à payer à l’office de l’habitat du Var et à la société M… une indemnité de 1 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
 
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 7 septembre 2021.
 
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
 
Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 12 janvier 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, notamment en ce qui concerne le détail des postes de préjudice, Mme V… demande à la cour, au visa des articles 1719 et suivants du code civil et 1231-1 du code civil, de:
 
  • réformer le jugement;
  • débouter l’office public de l’habitat du Var et la société M… de l’ensemble de leurs demandes;
 
Statuant à nouveau,
 
  • condamner solidairement l’office public de l’habitat du Var et la société M… à lui payer la somme de 12 244 € en réparation de ses préjudices, outre 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile;
  • condamner solidairement l’office public de l’habitat du Var et la société M… aux dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
 
Elle chiffre son préjudice comme suit:
 
  • frais divers restés à charge: 1 440 €
  • assistance par tierce personne: 272 €
  • déficit fonctionnel temporaire: 1 032 €
  • souffrances endurées: 5 000 €
  • déficit fonctionnel permanent: 4 500 €.
 
Au soutien de son appel et de ses prétentions, elle fait valoir que:
 
  • en application des articles 6 de la loi du 6 juillet 1989, 1719 et suivants et 1231- 1 du code civil, le bailleur doit garantir à son locataire une jouissance paisible des lieux et est tenu d’une obligation de sécurité,
  • un procès-verbal de constat, dressé le 13 mars 2017, confirme l’existence sur le passage menant au bâtiment B de l’immeuble d’un enfoncement de 7 cm et d’une déformation de l’enrobé sur plus de la moitié de la chaussée;
  • le bailleur a commis une faute en n’entretenant pas la chaussée et en ne réparant pas l’affaissement;
  • elle n’a elle-même commis aucune imprudence puisqu’elle ignorait l’existence de cet affaissement.
 
Dans ses dernières conclusions d’intimée, régulièrement notifiées le 12 avril 2021, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, l’office public de l’habitat du Var et la société M… demandent à la cour de:
 
  • confirmer le jugement et débouter Mme V… de ses demandes;
  • condamner Mme V… à leur verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel, outre les entiers dépens d’appel,
 
A titre infiniment subsidiaire,
  • fixer l’indemnisation à la somme totale de 8 592 €
  • fixer l’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile au maximum à 1 000 €;
 
En tout état de cause,
 
  • rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires;
 
Elles proposent de chiffrer le préjudice de la façon suivante:
 
  • déficit fonctionnel temporaire : 792 €
  • souffrances endurées : 3 000 €
  • déficit fonctionnel permanent : 3 810 €
  • assistance par tierce personne : 240 €
  • frais divers : 750 €.
 
Elles font valoir que:
 
  • Mme V… ne peut fonder sa demande sur les dispositions de l’article 1384 devenu 1242 du code civil dès lors qu’elle est liée à l’office public de l’habitat du Var par un contrat de bail;
  • la dénivellation du sol n’a joué aucun rôle dans la survenance du dommage qui trouve sa cause exclusive dans le comportement fautif de la victime puisque Mme L…, habitante de l’immeuble qui se trouvait sur son balcon au moment de la chute, a expliqué que celle-ci est survenue alors qu’elle conversait avec Mme V…, ce qui démontre que celle-ci n’était pas normalement attentive puisqu’elle ne regardait pas le sol en marchant;
  • l’affaissement est visible pour une personne normalement attentive et il existe un espace suffisant pour l’éviter;
  • Mme V… ne pouvait ignorer l’existence de cet affaissement dont elle ne s’est jamais plaint auprès de son bailleur;
  • les pathologies dont elle souffre à l’épaule et au rachis ne sont pas de nature traumatique et s’agissant du genou, elle ne formule aucune demande d’indemnisation.
 
La CPAM du Var, assignée par Mme V…, par acte d’huissier du 20 janvier 2021, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l’appel et des conclusions d’appelante, n’a pas constitué avocat.
 
Par courrier adressé au greffe de la cour d’appel le 30 novembre 2020, elle a fait connaître le montant définitif de ses débours pour 2 909,91 €, correspondant à des prestations en nature.
 
L’arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.
 
MOTIFS DE LA DÉCISION
 
Sur le droit à indemnisation
 
L’article 1719 du code civil impose au bailleur d’entretenir la chose louée en état de servir à l'usage pour lequel elle est louée et d’effectuer pendant la durée du bail, toutes les réparations, autres que locatives, qui peuvent devenir nécessaires.
Il doit également assurer à son locataire une jouissance paisible des lieux loués.
 
Ces obligations signifient que le bailleur doit s'abstenir de toute action qui pourrait causer un trouble de jouissance au preneur et qu’il doit effectuer toutes les réparations nécessaires à cette jouissance paisible.
 
En conséquence toute inaction de sa part, par défaut d’entretien de la chose louée ou de réalisation des travaux nécessaires, est susceptible d’engager sa responsabilité.
 
Par ailleurs, le bailleur est tenu d’une obligation de sécurité qui lui impose de mettre en oeuvre tous les moyens propres à assurer la sécurité de son locataire.
 
Il en résulte qu’un défaut d’entretien ou de réparations de la chose louée susceptible d’entraver la sécurité du locataire, engage la responsabilité du bailleur et l’oblige à indemniser son locataire du préjudice corporel que sa négligence a causé.
 
Les réparations dues par le bailleur sont toutes celles qui ne sont pas locatives et qui sont nécessaires à un usage du bien conforme aux prévisions contractuelles et sécure. Il s’agit des réparations importantes tenant à la structure de la chose, qui s’entendent également, au-delà des éléments principaux du local loué, de celles afférentes à la voie qui y mène, notamment les parties communes afin de ne pas priver les preneurs des avantages qu'ils tiennent du bail.
 
En l’espèce, il n’est pas contesté que le 20 décembre 2016 Mme V… a chuté sur le passage menant à l’entrée du bâtiment dans lequel elle loue son logement à l’office public de l’habitat du Var.
 
Il résulte d’une attestation de Mme L…, qui a assisté à cette chute que "Mme V… a trébuché et est tombée à cause du trou situé sur le parking entre le trottoir de l’appartement du rez de chaussée et le lampadaire situé à l’angle du bâtiment".
 
Mme V… produit un procès-verbal de constat dressé par Me A…, huissier de justice, le 13 mars 2017 révélant que le passage litigieux présente un enfoncement et une déformation de l’enrobé. L’huissier relève que cet affaissement occupe plus de la moitié de la chaussée. Ses constatations sont confirmées par des photographies jointes au constat qui confirment l’existence d’un affaissement occupant plus de la moitié de l’espace séparant le lampadaire du mur du garage. Par ailleurs, l’huissier a procédé à une mesure de la hauteur de cet affaissement et relevé qu’il existait 6 cm de dénivelé entre le point haut et le point le plus bas de l’affaissement.
 
La matérialité de la chute de Mme V… sur cet affaissement de la chaussée ne peut donc être contesté.
 
Or, le passage sur lequel a eu lieu la chute, partie commune de l’immeuble, mène à son appartement depuis le parking et son entretien relève de l’office public de l’habitat du Var, bailleur, afin que les locataires puissent l’emprunter en toute sécurité pour rejoindre leur logement.
 
L’office public de l’habitat du Var et son assureur soutiennent que la chute est en réalité due à une inattention de Mme V… qui, connaissant l’état de la chaussée, aurait dû être vigilante et regarder ses pieds en marchant.
 
Cependant, si Mme L… indique que la chute a eu lieu alors qu’elle conversait avec Mme V… depuis le balcon de son appartement, cette précision ne démontre pas que cette dernière était exclusivement concentrée sur la conversation au point d’être totalement inattentive aux conditions dans lesquelles elle marchait sur le parking. Il ne peut ainsi être considéré que la chute est exclusivement due à une inattention de la victime.
 
Dès lors que la chaussée présente, à l’endroit précis où a eu lieu la chute, un dénivelé de près de six centimètres sur plus de la moitié du passage et que Mme V… a trébuché à cet endroit, sa chute a bien été causée par le caractère irrégulier du sol, lequel a pour origine l’inexécution par l’office public de l’habitat du Var des travaux propres à remédier à l’affaissement de l’enrobé sur un passage devant permettre aux locataires d’accéder en toute sécurité à leur logement. Par ailleurs, le bailleur ne démontre pas avoir installé une quelconque signalisation sur le passage afin d’appeler les locataires à la vigilance. Enfin, l’ancienneté de l’affaissement ne saurait exonérer l’office public de l’habitat du Var de son obligation d’assurer la sécurité physique des locataires de l’immeuble loué.
 
En revanche, il est certain que le passage étant, de l’aveu même de Mme V…, affaissé depuis plusieurs semaines, celle-ci aurait dû être particulièrement vigilante. Sa conversation avec Mme L… qui se trouvait sur son balcon en hauteur a contribué à la détourner de toute l’attention que l’état de la chaussée exigeait.
 
Cette faute d’inattention est de nature à réduire son droit à indemnisation dans une proportion que la cour estime devoir fixer à 25 %.
 
En conséquence, l’office public de l’habitat du Var et son assureur seront condamnés in solidum à indemniser Mme V… à hauteur de 75 % des préjudices que cette chute a entraînés.
 
Sur le préjudice corporel
 
L’expert, le docteur I…, indique que Mme V… a présenté à la suite de sa chute un traumatisme du genou gauche et de la main gauche. Elle conserve comme séquelles au genou une distension de la plastie du croisé antérieur.
 
Il conclut à :
 
  • un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 20 décembre 2016 au 5 janvier 2017;
  • un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 6 janvier 2017 au 20 janvier 2017;
  • un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 10 % du 21 janvier 2017 au 7 septembre 2017;
  • une consolidation au 7 septembre 2017;
  • des souffrances endurées de 2,5/7;
  • un déficit fonctionnel permanent de 3 %;
  • un besoin d’assistance de tierce personne de 1 h par jour du 20 décembre 2016 au 5 janvier 2017.
 
Mme V… était âgée de 50 ans au moment de sa chute et de 51 ans au jour de la consolidation.
 
Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, née le 31 août 1966, de son absence d’activité professionnelle, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s’ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.
 
Préjudices patrimoniaux
 
Temporaires (avant consolidation)
 
- Dépenses de santé actuelles 2 909,91 €
 
Ce poste est constitué des frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, massages, appareillage pris en charge par la CPAM soit 2 909,91 €, la victime n’invoquant aucun frais de cette nature resté à sa charge.
Après application de la réduction du droit à indemnisation, la créance de la CPAM s’élève à 2 181,43 €.
 
- Frais divers 1 440 €
 
Ils sont représentés par les honoraires d’assistance à expertise par le docteur K…, médecin conseil. Ces dépenses supportées par la victime, nées directement et exclusivement de l'accident, sont par la même indemnisables. Mme V… verse aux débats la facture du docteur K… de 1 440 €.
En regard de la réduction du droit à indemnisation, c’est une somme de 1 080 € qui revient à ce titre à Mme V….
 
- Assistance par tierce personne 289 €
 
La nécessité de la présence auprès de Mme V… d'une tierce personne n’est pas contestée dans son principe ni son étendue pour l’aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d’autonomie mais elle reste discutée dans son coût.
 
L’expert précise, en effet, qu’elle a eu besoin d’une aide non spécialisée à raison d’une heure par jour pendant la période de déficit fonctionnel temporaire à 50 % soit du 20 décembre 2016 au 5 janvier 2017.
 
En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d’indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d’aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées. Eu égard à la nature de l’aide requise et du handicap qu’elle est destinée à compenser, des tarifs d’aide à domicile en vigueur dans la région, l’indemnisation se fera sur la base du taux horaire moyen de 17 € sollicité par la victime.
 
L’indemnité de tierce personne s’établit à 289 €.
Après application du taux de réduction du droit à indemnisation, c’est une somme de 216,75 € qui revient à Mme V… à ce titre.
 
Préjudices extra-patrimoniaux
 
Temporaires (avant consolidation)
 
- Déficit fonctionnel temporaire 951,75 €
 
Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l’existence et le préjudice d’agrément et le préjudice sexuel pendant l’incapacité temporaire.
 
Il doit être réparé sur la base d’environ 810 € par mois, eu égard à la nature des troubles et de la gêne subie soit:
 
  • déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 20 décembre 2016 au 5 janvier 2017 : 229,50 €
  • déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 6 janvier 2017 au 20 janvier 2017 : 101,25 €
  • déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 10 % du 21 janvier 2017 au 7 septembre 2017 : 621 €
  • et au total la somme de 951,75 €, soit après application du taux de réduction du droit à indemnisation, une somme de 713,81 € revenant à Mme V….
 
- Souffrances endurées 5 000 €
 
Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison des douleurs consécutives à la chute et durant le traitement ; évalué à 2,5/7 par l’expert, il justifie l’octroi d’une indemnité de 5 000 €. Après réduction du droit à indemnisation, c’est une somme de 3 750 € qui revient à Mme V… à ce titre.
 
Permanents (après consolidation)
 
- Déficit fonctionnel permanent 4 020 €
 
Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte anatomo-physiologique à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence personnelles, familiales et sociales.
 
Il est caractérisé par une lésion de la distension de la plastie ligamentaire à l’origine d’une instabilité modérée du genou gauche, ce qui conduit à un taux de 3 % justifiant une indemnité de 4 020 € pour une femme âgée de 51 ans à la consolidation.
Après réduction du droit à indemnisation, il revient à Mme V… au titre du déficit fonctionnel permanent une somme de 3 015 €.
 
Récapitulatif
 
Postes Préjudice total Dette d’indemnisation Part victime Part tiers payeur
Dépenses de santé 2 909,91 € 2 182,43 € 0 € 2 182,43 €
Frais divers 1 440 € 1 080 € 1 080 € 0 €
Assistance par tierce personne 289 € 216,75 € 216,75 € 0 €
Déficit fonctionnel temporaire 951,75 € 713,81 € 713,81 € 0 €
Souffrances endurées 5 000 € 3 750 € 3 750 € 0 €
Déficit fonctionnel permanent 4 020 € 3 015 € 3 015 € 0 €
Totaux 14 610,66 € 10 957,99 € 8 775,56 € 2 182,43 €

 
Le préjudice corporel global subi par Mme V… s’établit ainsi à la somme de 14 610,66 €, imputables à hauteur de 75 % à l’office public de l’habitat du Var et son assureur, soit 10 957,99 € et, après imputation des débours de la CPAM (2 182,43 €), une somme de 10 957,99 € lui revenant qui, en application de l'article 1231-7 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt, soit le 4 novembre 2021.
 
Sur les demandes annexes
 
L’office public de l’habitat du Var et la société M…, qui succombent partiellement dans leurs prétentions et sont tenus à indemnisation, supporteront la charge des entiers dépens de première instance et d’appel. L’équité ne commande pas de leur allouer une somme au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.
 
L’équité justifie d’allouer à Mme V… une indemnité de 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et devant la cour.
 
PAR CES MOTIFS :
 
La Cour,
 
- Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
 
Statuant à nouveau et y ajoutant,
 
Dit que l’office public de l’habitat du Var a manqué à ses obligations contractuelles envers Mme V… et qu’il est tenu, in solidum avec son assureur, de réparer les conséquences dommageables de la chute de Mme V… le 20 décembre 2016;
 
Dit que Mme V… a commis une faute ayant contribué à son préjudice et limite son droit à indemnisation à 75 %;
 
Condamne in solidum l’office public de l’habitat du Var et la société M… à payer à Mme V… les sommes suivantes:
* 1 080 € au titre des frais divers;
* 216,75 € au titre de l’assistance par tierce personne;
* 713,81 € au titre du déficit fonctionnel temporaire;
* 3 750 € au titre des souffrances endurées;
* 3 015 € au titre du déficit fonctionnel permanent;
le tout avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt;
* 2 500 € au titre des frais non compris dans les dépens exposés en première instance et en appel;
 
Déboute l’office public de l’habitat du Var et la société M… de leur demande au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel;
 
Condamne in solidum l’office public de l’habitat du Var et la société M… aux entiers dépens de première instance et d’appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.
 
ET LE PRESENT JUGEMENT A ETE SIGNE PAR LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.

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